Blanquer : le macronisme appliqué à l’Education Nationale

Le ministre de l’Education nationale Jean-Michel Blanquer est une personnalité importante du gouvernement actuel, mais c’est également le type de personnage qui sert parfaitement la politique qui consiste à déconstruire un conquis social comme l’éducation pour tous. Jean-Michel Blanquer vient d’une famille riche parisienne. En janvier, il a épousé Anna Cabana, qui a été grand reporter au Point, rédactrice en chef politique à partir de 2016 du Journal du Dimanche, en parallèle éditorialiste politique de la chaîne d’information BFM TV et animatrice d’une émission quotidienne sur i24news, dont une consacrée à Jean-Michel Blanquer et le protocole sanitaire.

Blanquer fait partie du ministère de l’Education nationale depuis Jacques Chirac. Il a pris de l’importance sous Nicolas Sarkozy, et a été écarté pendant le quinquennat Hollande comme figure trop marquante du sarkozysme. Entre 2007 et 2012, c’est lui qui organise la suppression de plus de 60000 postes d’enseignants et qui divise par deux le « fonds social lycéen », une bourse destinée aux élèves en difficultés financières pour se payer la cantine notamment. Il passe ainsi de 73 à 32 millions d’euros en 10 ans.

En 2013, il a été nommé directeur de l’Ecole Supérieure des Sciences Economiques et Commerciales, une école privée de la région parisienne, et déclare : “De façon générale, les écoles de management, les écoles de commerce sont souvent à la pointe des innovations pédagogiques.”. Blanquer écrit également un livre, « L’Ecole de demain », dans lequel il propose une contractualisation des personnels à tous les étages. Le chef d’Etablissement deviendrait « véritablement le patron de son établissement » et les résultats obtenus par les élèves seraient le critère majeur de l’évaluation des enseignants. L’efficacité des équipes pédagogiques serait mesurée par une agence extérieure et les résultats seraient transmis aux familles qui pourraient ainsi choisir l’établissement selon sa performance. Ce serait la mise en concurrence des établissements scolaires dans le monde rêvé de Blanquer et autres défenseurs du capitalisme.

Dès sa nomination comme ministre de l’Education nationale, il revient sur les actions menées par sa prédécesseure Najat Vallaud-Belkacem, notamment sur les classes bilangues et l’enseignement des langues de l’Antiquité comme le latin et le grec. A la rentrée 2018, il a annoncé la suppression de 1800 postes, alors que la projection montrait que le nombre d’élèves devait augmenter jusqu’en 2022. Sa réforme du lycée consiste à supprimer les filières L, ES et S et à modifier les épreuves pour l’obtention du bac, notamment avec l’apparition du « grand oral », qui est plutôt une aubaine pour les élèves qui baignent dans un milieu où l’expression orale est aisée. Blanquer met en place également la plateforme Parcoursup, qui, si l’on devait en juger la performance, est une catastrophe par rapport à l’ancien système d’orientation post-bac.

La gestion de la pandémie par Blanquer s’est révélée être des plus incohérentes, tout d’abord en opposition avec le premier ministre, puis en opposition avec ses propres annonces. Une fois on ferme les écoles, une autre fois on les ouvre, une fois on ne met pas les masques à l’école, une autre fois on met les masques, une fois le virus ne touche pas les écoles, une autre fois le virus est véhiculé par les enfants….tout cela sur fond d’économie de centaines de millions d’euros dans le budget de l’Education nationale. Jean-Michel Blanquer est un personnage important dans la mise en place de mesures favorisant le système capitaliste et, à ce titre, il apparaît régulièrement dans les médias pour défendre la politique du gouvernement dans son ensemble, y compris sur des sujets qui ne relèvent pas de sa compétence. Par exemple, lorsqu’il s’est exprimé sur les cheminots et sur le projet “égalitaire” du gouvernement. Il faut bien entendu entendre “égalitaire” dans le sens du moins disant social.

Si Blanquer fait des économies dans son ministère, il n’est en revanche pas avare en louanges pour Emmanuel Macron. Il a par exemple déclaré dans le Monde du 30 mars 2021 : « Le président a acquis une vraie expertise sur les sujets sanitaires (…) Ce n’est pas un sujet inaccessible pour une intelligence comme la sienne. ». Les controverses sont fort nombreuses. En avril 2018, il explique dans le Parisien que les élèves doivent maîtriser la conjugaison des verbes et que « le passé simple est une exigence de justice sociale », alors que lui-même commet des erreurs. Ou en posant la question devant des caméras à des élèves d’une classe de primaire : « Est-ce que vous avez lu pendant les vacances ? » alors que les enfants sortaient d’une période de confinement et que les professeurs se démenaient pour maintenir l’enseignement à distance. Ce ministre a réussi l’exploit de se mettre à dos la grande majorité des personnels de l’Education nationale. Y compris, fait rare, les syndicats de Chefs d’Etablissement qui ont appelé à la dernière grève.

En 2019 et 2020, le ministère de l’Education a versé des subventions (65000 et 30000 euros) à un syndicat lycéen Avenir lycéen, monté de toute pièce pour défendre la politique du gouvernement. Sans surprise, ses jeunes fondateurs sont des adhérents des “jeunes avec Macron”. On ne sait trop à quoi ont pu servir ces subventions qui étaient censées financer un congrès qui n’a jamais eu lieu, si ce n’est des notes dans des restaurants étoilés ou des hôtels luxueux (il n’y a pas d’âge pour dilapider l’argent public), mais on sait que Blanquer a personnellement échangé avec des dirigeants du syndicat Avenir lycéen sur des projets politiques. Le soutien technique s’est fait par l’achat de matériel informatique, grâce à ces subventions, et a permis indirectement à Blanquer de contrecarrer la mobilisation contre sa réforme du bac par de la propagande progouvernementale à l’intérieur des lycées.

De plus, Blanquer est un fin connaisseur des annonces trompeuses. En janvier, il annonce un plan de 10 milliards d’euros pour augmenter les salaires des enseignants. On apprenait ensuite, comme dans les conditions écrites en petit dans les contrats d’assurances, que ces 10 milliards allaient s’étaler sur 15 ans : cela correspond donc à une augmentation de salaire de 9 % d’ici 2037, à comparer avec une inflation qui sera supérieure. En définitive les enseignants auront donc une baisse de pouvoir d’achat.

En août 2021, s’aventurant dans le domaine de la médecine scientifique, il affirme qu’une personne vaccinée ne peut pas transmettre le virus aux autres.  Et fin août, Blanquer prétend que les parents d’élèves utilisent l’allocation de rentrée scolaire à une autre fin que celle d’acheter des fournitures scolaires et il parle alors d’une augmentation des ventes d’écrans plats en septembre, affirmation fausse évidemment puisque les ventes d’écrans plats baissent en août et septembre.  On voit que Jean-Michel Blanquer ne recule devant aucun mensonge pour pouvoir appliquer une politique ultra libérale, et en cela il représente le serviteur type d’un système, prêt à toutes les controverses et toutes les tromperies pour arracher l’Education nationale du service public de l’Etat, en calquant son fonctionnement sur les méthodes de gestion et les critères de performance du privé.

Pour la macronie, dont Blanquer est un parfait représentant, l’Education Nationale n’est qu’un centre de formation devant répondre aux besoins des entreprises. Les élèves n’y sont que de futurs salariés (ou chômeurs) qui doivent y être formatés pour répondre aux objectifs de rentabilité financière de la classe parasite capitaliste. L’autonomie et la mise en compétition entre eux des établissements scolaires n’a pour but que d’extraire une « élite » (les enfants de la classe bourgeoise) qui constituera les dirigeants et les cadres de la prochaine génération. On est bien loin d’une Ecole formant des citoyens éclairés, futurs acteurs de la démocratie. C’est pourquoi il faut soutenir sans réserve les mobilisations des personnels de l’Education Nationale contre l’application de ces politiques.

Éric JOUEN PCF

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