Par Gauthier Hordel, PCF 76
Le rappel des évènements mettant en cause Lula
Les récentes révélations du site d’informations The Intercept, appartenant au fondateur d’Ebay, laisse apparaître que la justice brésilienne à travers l’opération « Lava Jato » (opération anticorruption, littéralement « lavage express ») a conspiré contre Luiz Inácio Lula da Silva dit Lula, l’ancien président brésilien membre fondateur du Parti des travailleurs (PT), en l’accusant de corruption. Le résultat fut une condamnation à la prison ferme en juillet 2017, confirmé début 2018. Cette situation l’empêcha de se présenter à l’élection présidentielle d’octobre 2018 malgré les sondages qui le donnaient favori face à Jair Bolsonaro l’actuel président. Il est facile de deviner que cette vaste conspiration était faite pour empêcher toute possibilité au Parti des Travailleurs et à Lula de pouvoir remporter les élections présidentielles en écartant ce dernier définitivement du champ politique. Il lui fut notamment interdit de pouvoir soutenir publiquement Fernando Haddad le candidat du PT lui succédant en tant que candidat dans la campagne des présidentielles.
Les preuves apportées par The Intercept sont des messages issus d’un échange à travers la messagerie chiffrée Telegram entre le juge fédéral Sergio Moro et le procureur en chef de l’enquête « Lava Jato » Deltan Dallagnol. Le juge fait part de ses doutes concernant les chefs d’accusation de Lula, un manque de preuves sur sa soi-disant corruption laquelle Lula a toujours clamé son innocence. Ces révélations démontrent de façon claire les relations entretenues entre les deux hommes pour élaborer une vaste machination anti PT. Lula est accusé d’avoir bénéficié d’un appartement de la part de l’entreprise privée de BTP OAS en échange duquel il lui aurait fait obtenir un juteux contrat avec l’entreprise semi-publique pétrolière Petrobas détenue à 32,22 % par l’Etat central brésilien, ou Union Fédérale. Or il n’a jamais été prouvé que Lula a été corrompu, mais par ce magnifique tour de passe-passe, dont le but était de faire gagner le candidat nationaliste Jair Bolsonaro à la présidentielle, a été permise la promotion du juge Moro lui faisant accéder au poste de ministre de la justice en guise de récompense.
Les racines de la montée de Jair Bolsonaro
Les publications du site The Intercept montrent la totale partialité de la justice brésilienne et des liens tentaculaires qui unissent Bolsonaro aux hommes de « justice » , la corruption règne au sommet. C’est l’arroseur arrosé si toutefois l’arroseur risquait d’être arrosé. Or la situation brésilienne tend à démontrer le contraire, une « contre-révolution » nationaliste fait rage avec des personnalités politiques qui n’hésitent pas à se revendiquer de la dictature militaire (1964-1985) dont Bolsonaro est un nostalgique. Il faut se souvenir de ses phrases : « l’erreur de la dictature fut de torturer et non de tuer ». Ses diatribes ont visé principalement les communistes et les socialistes, d’où cet acharnement contre le PT, principale force de gauche au Brésil. Cette « contre-révolution » a clairement montré son visage lors du coup d’Etat institutionnel contre la présidente Dilma Roussef (présidente entre 2011 et 2016), elle aussi membre du PT, destituée lors de son deuxième mandat le 31 août 2016. Tout est mis en œuvre pour affaiblir le PT par des moyens légaux ou non.
La force de Bolsonaro vient aussi du fait qu’il se trouve pour le moment peu inquiété des conséquences de sa politique réactionnaire qui crée pourtant de l’agitation. Les États-Unis notamment par les annonces publiques de Trump qui lui apporte son soutien sont un allié sûr pour l’instant. L’Amérique Latine est la chasse gardée de Washington et le Brésil représente un important champ d’investissements avec les profits qui vont avec. Si Bolsanaro et Trump partagent les mêmes idées rétrogrades et réactionnaires, ce qui intéresse les États-Unis est avant tout son expansion économique. Derrière Bolsonaro il y a également les propriétaires terriens et les industriels qui dans une économie capitaliste, c’est à dire basée sur la propriété capitaliste, est un gage de sécurité. Or le PT représentait un obstacle au développement dérégulé du capitalisme et à la recherche du profit maximum.
Néanmoins, il faut relativiser l’aspect socialiste du PT car pendant les nombreuses années où le parti était au pouvoir par l’intermédiaire de Lula (2002-2010) et Dilma Roussef (2011-2016), le Brésil est resté un état capitaliste. Certes, sous la présidence Lula, le Brésil a mené une politique en faveur des plus démunis en réduisant les inégalités qui étaient à un point extrême, ceci dit après avoir accepté de mener un politique de rigueur imposé par le FMI. Entre 2003 et 2011, 15 millions d’emplois ont été créés. Pour mener cette politique, Lula a pu s’appuyer sur l’essor économique qu’a connu le Brésil avec des taux de croissance variant de 5 % à 8 %, le faisant passer d’un état peu développé du point de vue capitaliste à la neuvième puissance mondiale. À cette époque Lula a misé sur les investissements étrangers pour favoriser le développement économique. Lula est très populaire parmi les travailleurs, il est issu de leurs rangs, en tant qu’ouvrier métallurgiste gravissant les échelons pour devenir responsable syndical de la métallurgie. Or après son passage au pouvoir le Brésil demeure encore aujourd’hui le troisième pays le plus inégalitaire d’Amérique Latine.
Mais une question demeure sur la situation brésilienne : qu’est ce qui a permis à Bolsonaro de gagner les élections alors que Lula était donné gagnant. Formulée autrement, la question est : comment le Parti social-libéral à gagné face au PT. Fernando Haddad le remplaçant de Lula à la présidentielle n’a effectivement pas la même popularité auprès des travailleurs. Le nationalisme était déjà en développement lors de la période précédente pour les mêmes raisons que l’on voit en Europe ou dans le monde. Le nationalisme émerge sur les bases pourrissantes du capitalisme et ce pourrissement s’explique par les conséquences économiques et sociales qui ont succédé à la crise économique de 2007-2008. Le Brésil s’est retrouvé dans une période de récession et de stagnation économique. En 2015 et 2016 le taux de croissance avoisiné les -3,5 %, aujourd’hui ils sont autour de 1 %, ce qui provoque les mêmes effets que nous percevons en Europe. De la même façon, le PT se retrouve confronté aux mêmes problèmes auxquels sont confrontés les grands partis de gauche. Dans les deux cas, ces partis se bornent à défendre une politique réformiste et lorsqu’ils se retrouvent au pouvoir, ils sont obligés de mener une politique d’austérité dictée par les nécessités de l’économie capitaliste. L’absence d’une politique révolutionnaire, c’est à dire une politique qui vise à briser la mainmise des capitalistes sur l’économie et les perspectives programmatiques favorise l’émergence du nationalisme. Les effets de la crise sur les populations (chômage, précarité etc.) font émerger un sentiment de colère qui renforce les contre-révolutionnaires. Ce phénomène se retrouve dans tous les pays d’Amérique Latine qui ont vu des forces progressistes arriver au pouvoir et qui font face à des contre-révolutions soutenues par les capitalistes de tous bords.
Le nationalisme tend à s’installer durablement en l’absence de perspectives claires mettant fin au capitalisme. Les réalités de l’économie capitaliste mettent à mal les illusions réformistes ce qui affaiblit les partis de gauche obligés de se conformer au dictat du marché. Lula a été victime de cette situation et cela devrait sonner comme une alerte pour les partis se revendiquant des intérêts des travailleurs. Tant que les capitalistes conserveront la mainmise sur l’économie, les travailleurs seront toujours soumis aux desiderata des capitalistes et des fluctuations du système économique. Pour l’heure il faut dénoncer les agissements contre-révolutionnaires de Bolsonaro et de sa bande, lutter pour la libération de Lula et construire le programme révolutionnaire qui ouvrira la voie à la fin du capitalisme emportant dans son sillage le nationalisme.
Lula victime du nationalisme ?
Lula est la victime du réformisme, de sa recherche d’alliance avec la bourgeoisie, qui l’a conduit à ménager le grands capital brésilien et faire passer de nombreuses lois anti-sociales, même si il à d’un autre côté œuvré à réduire la grande pauvreté, le recours au crédit massif et à l’endettement des ménages n’est pas une politique social viable, surtout suivi d’une crise de l’endettement. Le nationalisme de Bolsonaro, n’est qu’un axe de reconquête des couches populaires, dont la conscience politique est bien faible, puisque les mêmes qui étaient prêt à voter Lula, selon les sondages, ont finalement voté Bolsonaro… Le nationalisme n’est que la conséquence de la crise du capitalisme, de la défaite de la social démocratie, et de la disparition du camp communiste.
Rody, il me semble que ce que tu dis c’est que l’auteur dit aussi dans les trois derniers paragraphes. As tu lu l’article dans son intégralité ou t’es tu arrêté au titre?