Le 2 avril dernier, un accord-cadre était trouvé lors des négociations menées à Lausanne en Suisse entre le groupe G5+1 (Allemagne, Chine, Etats-Unis, France, Grande-Bretagne et Russie) et l’Iran sur le programme nucléaire iranien. Les diplomates participant à la négociation assurent que la rédaction d’un accord final sera actée d’ici fin juin. La diplomatie américaine n’a pas manqué de faire des déclarations triomphantes assurant qu’aucun pays au monde ne ferait l’objet d’autant de surveillance et de vérifications que l’Iran sur son programme d’enrichissement d’uranium.
Alors que les relations entre les Etats-Unis et l’Iran étaient pour le moins très tendues jusqu’en 2013, la conclusion d’un tel accord est la conséquence des changements radicaux de ces dernières années en ce qui concerne la situation géopolitique de la région, et même dans une plus large mesure au niveau mondial. Rappelons qu’il y a encore peu de temps, sous l’administration Bush, le régime iranien était classé par Washington comme appartenant à « l’axe du Mal » qu’il fallait combattre par tous les moyens possibles. Embargo, sanctions économiques, menaces de bombardements de ses installations nucléaires et militaires : il ne fallait reculer devant rien pour isoler et affaiblir l’Iran. Le Président Obama n’a montré dans les faits absolument aucun signe de changement radical de stratégie. On se souvient notamment que la Maison Blanche a fait saisir la justice et condamner la BNP à payer une lourde amende pour avoir effectué des transactions financières avec l’Iran.
En l’espace de quelques années, comment un pays qui était décrit comme une menace pour la stabilité de la région (accusation ne manquant pas de culot de la part du gouvernement américain) et se heurtait ainsi à des positions intransigeantes de la part des puissances occidentales, a-t-il pu se voir accorder d’importantes concessions dans le cadre de son programme d’enrichissement nucléaire ?
Il n’aura échappé à personne que la situation au Moyen-Orient est proche du chaos. Un chaos provoqué d’une part en Irak par l’intervention américaine contre le régime de Saddam Hussein, et d’autre part en Syrie par la répression sanglante menée par le régime de Bachar El-Assad contre toute forme d’opposition. C’est sur ce chaos que l’organisation Etat Islamique a pu prospérer et étendre son influence. Soulignons d’ailleurs que les services secrets américains ont financé des milices fondamentalistes syriennes, qui depuis se sont ralliées à l’EIIL, dans le but de déstabiliser le régime syrien et d’empêcher le Hezbollah d’étendre son influence dans l’opposition à El-Assad. Pour limiter la progression de l’EIIL, Washington a besoin de s’assurer la coopération des deux Etats forts de la région : l’Arabie Saoudite qui est déjà un allié de longue date, et l’Iran. Il n’est donc pas étonnant à ce que les diplomaties américaine et iranienne cherchent à résoudre le plus important de leurs différends pour collaborer militairement contre leur ennemi commun qu’est l’EIIL.
En plus de la question stratégique régionale, on peut trouver derrière ce réchauffement des relations une stratégie plus globale ainsi que la question énergétique. Les Etats-Unis sont le principal consommateur et importateur de pétrole au monde, ce qui fait de la question énergétique une composante très importante de ses relations internationales. Or, ses relations avec la Russie, deuxième producteur mondial de pétrole derrière l’Arabie Saoudite, se sont considérablement dégradées depuis la crise ukrainienne. Ces tensions avec la Russie se sont d’ailleurs concrètement matérialisées durant les négociations – le ministre des affaires étrangères Serguei Lavrov quittant brusquement les pourparlers au plus fort des discussions avant de finalement revenir. En effet, la diplomatie russe s’inquiète de voir les Etats-Unis s’enlever une épine du pied et craint de la voir désormais se concentrer plus précisément sur les problématiques de la périphérie russe où Poutine souhaiterait avoir les mains libres. De plus, la levée des sanctions contre Téhéran signifierait la mise sur le marché mondial du pétrole iranien, ce qui aurait pour conséquence d’accentuer la chute récente des cours du pétrole ainsi que la crise monétaire russe dont Moscou avait jusqu’ici réussi avec de grandes difficultés à limiter les conséquences.
Nous savons pertinemment que, contrairement à ce qu’affirme la propagande américaine, les Etats-Unis fondent leurs relations extérieures non sur des questions idéologiques (défense des idéaux de justice et liberté) mais uniquement sur ses intérêts politiques et économiques. Un tel revirement de position vis-à-vis du régime iranien en est une criante illustration. Devant le chaos créé dans la région dont le gouvernement américain est le principal contributeur, ce dernier est contraint de trouver un partenariat avec un pays qu’il diabolisait il y a quelques années seulement. Si un accord final était conclu cet été, nous pourrions prévoir comme nous l’avons analysé dans cet article non seulement une intensification des opérations militaires au Moyen-Orient, mais également un durcissement du bras de fer sur la question ukrainienne, ce qui conduirait à alimenter encore un peu plus l’escalade de la violence.
Jules B.
PCF Paris
“…dans le but de déstabiliser le régime syrien et d’empêcher le Hezbollah d’étendre son influence dans l’opposition à El-Assad ”
Le hezbollah n’est certainement pas dans l’opposition de El Assad , elle est à ces cotés , c’est son allié, son soutien.les allaouites dont El Assad fait parti est une branche du chiisme .Le hezbollah est chiite et leur allié respectif est l’iran