L’exploiteur du mois

Parmi les exploiteurs, il y a au moins deux espèces. Celle des plus puissants qui connaissent toutes les ficelles pour exploiter aux mieux les travailleurs, et celle des plus minables qui connaissent toutes les ficelles pour exploiter au mieux la misère humaine.

Notre exploiteur du mois fait partie de la deuxième catégorie. La victime, Mr Saliou B., est un immigrant du Sénégal fuyant la misère de son pays. Il obtient légalement un titre de séjour en Espagne et arrive alors en France en 2011. Il devient alors un « sans-papiers». En janvier 2014, il obtient un CDI dans une entreprise située à Malakoff dont le siège social est à Vanves.  Au mois de mai, Saliou a alors l’immense culot de réclamer le payement des heures supplémentaires qu’il a effectuées et qui ne lui sont pas payées. L’employeur connaissait bien la situation de sans-papiers de son employé. La loi dit que pour employer un sans-papiers, un formulaire doit être cosigné par l’employé et le patron pour faire reconnaître les fiches de paie. L’employeur n’ayant  ni demandé les papiers d’identité de Saliou ni fait signer ce formulaire, c’est donc lui qui est dans l’illégalité. Cependant, notre exploiteur ne se dégonfle pas : non seulement il ne paiera pas les heures supplémentaires mais en plus il arrêtera également le versement de son salaire.

Saliou est alors dans une position délicate car il est sans papiers, isolé, sans soutien, dans un pays qui n’est pas le sien et dont l’employeur menace de le licencier voire de le dénoncer s’il lui réclame son dû. Il travaille alors pendant 5 mois sans aucun salaire. Il téléphone alors à son exploiteur pour lui réclamer son salaire et celui-ci réitère ses menaces. Il lui adresse alors un courrier où il le menace de saisir les prud’hommes si ses droits ne sont pas rétablis. De manière générale les travailleurs font preuve de patience envers des exploiteurs, y compris ceux de la pire espèce ! Ces derniers n’hésitent cependant pas à prendre les devants pour nous attaquer. Le vendredi 19 décembre, Saliou est convoqué à un entretien préalable de licenciement, mais en réalité c’est un véritable guet-apens digne des grandes heures de la collaboration. Au lieu de se voir signifier une rupture de contrat, il est arrêté par la police et placé en centre de rétention administrative pour immigrés. « Ils m’ont menotté comme si j’étais un criminel, explique le travailleur. Les mains dans le dos, ils m’ont forcé à m’asseoir comme ça dans leur voiture. C’était pour mon patron le meilleur moyen de me licencier sans me payer les salaires qu’il me doit. ». C’est la première fois qu’un employeur appelle la police pour se débarrasser d’un travailleur sans papiers, qui s’appuie sur le droit du travail. Ceci est d’autant plus scandaleux que c’est l’employeur qui est en situation illégale. Si d’un coté il existe un formulaire à compléter par le salarié sans-papiers et l’employeur, et que de l’autre l’Etat ne reconnaît pas l’emploi de salariés sans-papiers et se met à les arrêter, nous sommes dans une véritable schizophrénie du système.

Aujourd’hui, Saliou n’est plus seul et il peut s’appuyer sur l’ensemble des confédérations syndicales qui sont indignées. « On va contacter l’inspection du travail, promet un responsable local de l’union syndicale Solidaires. On va aider Saliou à obtenir sa réintégration dans ses droits. Cet employeur a agi en dehors de toute légalité. ». Si les entreprises qui emploient illégalement des travailleurs comptent dorénavant utiliser la police pour éliminer les récalcitrants à ce véritable système esclavagiste, alors nous sommes rentrés dans une nouvelle ère. Les sans-papiers ne seront alors protégés par aucune loi, aucun droit, ni même par les droits de l’Homme ; car s’ils tentent de faire valoir leurs droits, ils seront conduit par la police à la frontière. Il ne manque plus que les chaînes aux pieds pour retourner aux heures les plus noires de l’humanité.

Nous nous joignons au syndicat pour réclamer la régularisation des heures travaillées par Mr Saliou, la régularisation de son statut de sans papiers en citoyen français. Nous voulons aussi la condamnation judiciaire de ce patron et nous réclamons la régularisation de l’ensemble des travailleurs sans-papiers. Qui participe à l’économie française et qui habite en France doit avoir la possibilité d’être citoyen français s’il le désire.

F.L.

PCF 28

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