Renault représente dans l’esprit collectif un symbole. Elle est le symbole de l’industrie automobile française, qui joue un rôle prépondérant sur le marché de l’automobile mondiale. Elle est surtout un exemple pour les luttes qui s’y sont déroulées, des luttes pour la reconnaissance des travailleurs, des luttes pour gagner des acquis sociaux comme juste retour des choses pour les salariés, sans lesquels rien n’est produit. Or tous ces combats ont été possibles grâce à la détermination de la CGT. Il était donc tout naturel de rencontrer les camarades de la CGT Renault Cléon, notamment son secrétaire Pascal Morel, afin qu’ils nous éclairent sur les réalités que vivent aujourd’hui les salariés de Renault.
Une politique anti CGT
La CGT Renault est le principal obstacle au démantèlement des acquis sociaux mené par la direction du groupe. Au début des années 2000, le site de Cléon a vu se renouveler près de la moitié de ses effectifs. Pascal Morel nous explique que ce fut le moment pendant lequel la direction a mené une campagne de casse de la CGT, avec les nouvelles recrues. Les entretiens se passaient en présence d’une psychologue chargé d’évaluer le « risque » de syndicalisation du candidat. Il rajoute que « la direction mettait en garde les nouveaux embauchés contre la CGT et disposait même d’un trombinoscope affichant la couleur politique de chacun ». Cette pression exercée par la direction s’est par la suite retournée contre elle, car un nombre important de ces jeunes embauchés ont adhéré à la CGT et ont permis un renouvellement de 50 % du syndicat. Néanmoins les attaques se poursuivent encore : de nombreuses pressions s’exercent sur les camarades, mais aussi sur les salariés grévistes.
Un accord dévastateur
Un accord a été signé le 13 mars 2013, appelé « accord compétitivité emploi », sous la contrainte de ce que Carlos Ghosn, PDG de Renault, appelle « un impératif d’ajustement industriel ». Il va sans dire que la CGT l’a rejeté, car c’est un outil de destruction sociale. Dans un contexte de saturation du marché et de concurrence accrue, cet accord sert uniquement à préserver les intérêts des actionnaires au détriment des salariés. Voilà la réalité du capitalisme, qui pour les salariés signifie la régression sociale, tandis que les actionnaires engrangent des dividendes, à hauteur de 500 millions d’euros pour l’année 2013.
Pour la direction de Renault, il n’y a pas d’intérêt divergent entre actionnaires et salariés. Elle n’hésite pas à présenter aux salariés des slogans tels que : « Notre objectif : 50 milliards de chiffre d’affaires ». Mais où va donc cet argent ? Par contre, l’accord en question se traduit pour les salariés par une augmentation du temps de travail, le gel des salaires et 8 260 suppressions d’emplois jusqu’en 2016.
Un des objectifs est l’optimisation des ressources humaines : en clair, il faut que les salariés acceptent de changer de site et cela peut se faire sous la pression de la direction. Les moyens de production sont mutualisés et standardisés, les postes de travail ne sont pas adaptés à de bonnes conditions de travail ; ils sont adaptés à l’augmentation de la productivité. Il va de soi que les conditions de travail se dégradent et continueront à se dégrader, car l’augmentation du volume de production et la suppression d’emplois sont liées, ce qui engendre beaucoup de souffrance chez les salariés.
Offensive idéologique
Comme expliqué plus haut, le levier du capitaliste pour faire face à la concurrence, tout en préservant ses profits, c’est d’augmenter la productivité. Pour se faire, la direction de Renault impose une organisation du travail en « lean manufacturing » – soit littéralement, en français, « dégraissage ». Il s’agit d’accroître la production en utilisant le moins de forces productives possible.
Il faut donc inculquer aux salariés la méthode du lean et faire valoir ses vertus. Ainsi le salarié est mis à contribution pour mettre le système en place, pour organiser son espace de travail selon cette méthode. Pour vanter les mérites du lean, la direction de Renault ne lésine pas sur les moyens, par exemple en utilisant tout un arsenal de vidéos diffusées sur les espaces de travail, pour la propagande. Bien évidemment, cela ne concerne pas que le lean ; l’idéologie de la direction, de manière générale, tourne en boucle. Ce n’est pas tout : elle a même mis en place une école de formation à la méthode du lean, afin de s’assurer que les salariés en soient totalement imprégnés. Mais c’est sans compter sur la détermination des CGTistes de Renault, qui ripostent massivement par leur présence dans l’usine, la distribution de tracts et l’influence qu’ils exercent sur les salariés.
Des conséquences dramatiques
L’augmentation de la productivité, qui passe notamment par le lean, engendre une forme de concurrence entre les sites, plutôt que la coopération. La direction met en place la compétition inter-sites. Mais bien au-delà, elle promeut la concurrence entre salariés à l’intérieur d’un même site en instaurant notamment « la prime au mérite ». Nous savons que toutes ces méthodes ont pour conséquence une dégradation accrue des conditions de travail et il ne faut pas s’étonner que, dans un contexte global de casse sociale et en exerçant des pressions salariales, il arrive des catastrophes. Au cours de la dernière période, l’usine de Renault Cléon a connu deux suicides. Le premier a été officiellement reconnu comme lié au travail. Pour le deuxième, l’enquête est en cours, mais il ne fait aucun doute, pour la CGT et le CHSCT, qu’il est lié à la pression qui s’exerce sur les salariés.
Renault et la sous-traitance
La politique d’exploitation maximale ne touche pas uniquement les salariés de Renault, mais aussi, bien évidemment, les sous-traitants. L’optimisation des profits a des conséquences immédiates sur les sous-traitants ; le donneur d’ordre leur met le couteau sous la gorge. Bien des entreprises sont dépendantes de l’activité que leur demande Renault. Dans ce cadre, Renault n’hésite pas à mettre la pression pour réduire les « coûts » de sous-traitance. Trois zones sont définies afin de mettre en place une hiérarchie de la priorité : la zone 1 étant la plus prioritaire. Par ce biais Renault impose à ses sous-traitants d’établir des accords semblables à l’accord compétitivité-emploi. Les conditions de ces accords deviennent de plus en plus draconiennes en fonction du niveau de priorité : c’est la condition sine qua non imposée pour faire partie des zones de sous-traitance prioritaires.
C’est dans ces conditions que la CGT de Renault Cléon mène le combat quotidiennement et sans relâche pour défendre les travailleurs. Les actionnaires n’ont que faire des conditions de travail des salariés ; seul le profit les guide. Cela provoque des dégâts considérables. Seul un rapport de force favorable permettra de briser l’emprise des capitalistes sur les salariés et c’est ce à quoi s’attellent nos camarades de Cléon.
Gauthier Hordel – CGT 76 et PCF Rouen
L’industrie automobile qui est un secteur stratégique de l’économie autant comme “producteur” que comme “client” doit être remis dans les mains de ceux qui la font vivre et qui lui permit de “grossir”!
Nationalisation de TOUTE l’industrie automobile avec TOUTE la sous-traitance et surtout sous le contrôle des salariés eux-même!!
La CGT devrait expliquer pourquoi nationaliser sous contrôle salarié!
Fraternellement