L es 10, 11 et 12 octobre dernier, le réseau Renforcer le PCF, renouer avec le marxisme organisait trois réunions publiques au « Prolé » d’Alès, dans le Gard. Cela fait quatre ans que le réseau de militants communistes prend ce type d’initiative sur la ville. Et c’est chaque fois un grand succès.
La révolution espagnole
La réunion du mercredi était consacrée au thème de la guerre civile en Espagne, et plus précisément de « l’épopée des républicains espagnols de la guerre d’Espagne à nos jours », titre du livre de l’orateur de la soirée, Joaquim Garcia, président de l’amicale des anciens guérilleros espagnol FFI Gard-Lozère. Près de cinquante personnes y ont assisté.
Dans son exposé introductif, Joaquim a dressé un tableau passionnant de l’histoire de l’Espagne depuis l’éclatement de la révolution, en 1931, jusqu’à la chute de Franco – et au-delà. Son récit du parcours des militants républicains exilés en France, à l’époque de la dictature, était plein d’anecdotes et de détails émouvants. Beaucoup de ces républicains ont activement participé au mouvement ouvrier français et y ont fait preuve d’un grand héroïsme, notamment pendant la Résistance.
Le débat qui s’en est suivi était à la fois fraternel et très animé. Il en va toujours ainsi dès qu’il s’agit de la révolution espagnole, qui a marqué le destin de tant de familles exilées en France. Qui portait la responsabilité de la défaite de la révolution ? Fallait-il uniquement lutter pour « la République » et la « défaite du fascisme », sans toucher au capitalisme espagnol – ou bien fallait-il, comme l’expliquait Trotsky à l’époque, engager la lutte pour la transformation socialiste de la société espagnole, condition de la victoire contre les armées de Franco ? S’agissait-il d’une défaite strictement militaire – ou avait-elle des causes politiques plus profondes ? Plusieurs camarades ont souligné qu’en désarmant les travailleurs et en réprimant toute atteinte à la propriété capitaliste, sous couvert de « légalité républicaine », le gouvernement du Front Populaire avait ouvert la voie à la victoire des fascistes. Les échanges sur ces questions furent vifs et passionnés. Mais tout le monde s’est mis d’accord, une fois la réunion terminée, autour de l’excellent buffet préparé par les camarades du réseau, qui d’ailleurs ont assuré trois jours de grande gastronomie !
La révolution russe
Le lendemain, jeudi 11 octobre, Hubert Prévaud (PCF 31) a animé la réunion sur la révolution russe de 1917. Il a commencé par rappeler les principaux événements de la révolution de 1905, cette « répétition générale » de 1917, selon l’expression de Lénine. 1905 a vu, pour la première fois, l’apparition des soviets (« conseils », en Russe), qui constituaient les organes démocratiques de la lutte révolutionnaire des masses exploitées. Hubert a ensuite décrit les différentes phases de la révolution de 1917, depuis l’insurrection qui a renversé la monarchie, en février, jusqu’à la conquête du pouvoir par le parti bolchevik, en octobre, en passant par les grandes étapes intermédiaires : le retour de Lénine en Russie en avril, le changement consécutif dans la ligne du parti bolchevik, l’offensive réactionnaire lors des « journées de juillet » et le fiasco de la tentative de coup d’Etat du général Kornilov, en août.
Le débat a couvert un grand nombre de sujets. La question a par exemple été posée : Octobre 1917 était-il un coup d’Etat ? Quelle était la base de soutien du parti bolchevik dans le pays ? Plusieurs intervenants ont souligné qu’en septembre 1917, les bolcheviks avaient conquis une nette majorité dans les soviets, dont un camarade a rappelé qu’ils constituaient des organes mille fois plus démocratique que le plus démocratique des parlements bourgeois. La stratégie de Lénine et Trotsky était précisément de gagner le soutien des masses avant de conquérir le pouvoir. C’est ce qui explique que l’insurrection d’octobre a été relativement pacifique : pratiquement personne ne voulait se battre pour sauver le gouvernement provisoire de Kerenski. C’est par la suite, avec la guerre civile et l’intervention de 21 armées étrangères, que le pays a plongé dans la violence. Le régime des soviets se défendait alors, l’arme au poing, contre une agression militaire des forces réactionnaires intérieures et internationales.
Significativement, la discussion s’est cristallisée sur la différence entre les idées marxistes des bolcheviks et celle des dirigeants réformistes du mouvement ouvrier français, aujourd’hui. Un camarade a expliqué que les bolcheviks ne reprochaient pas aux réformistes de lutter pour des réformes, mais au contraire de ne pas lutter pour des réformes, c’est-à-dire de renoncer à leur programme de réformes sous la pression des capitalistes. C’est ce qu’atteste par exemple l’expérience des gouvernements de gauche de 1981-86, 1988-93 et 1997-2002.
Hubert a conclu la réunion en répondant aux différentes questions et en appelant tous les camarades présents, notamment des Jeunes Communistes d’Alès, à étudier sérieusement les grandes leçons de la révolution russe.
La crise du capitalisme européen
C’est Jérôme Métellus, du PCF de Paris, qui a conclu le vendredi cette série de réunions publiques par un exposé sur « l’alternative communiste à la crise du capitalisme européen ». Après avoir donné quelques chiffres illustrant la gravité de la crise économique mondiale, il en a expliqué les causes fondamentales. Un bref détour par l’économie politique de Karl Marx – et notamment la théorie de la plus-value – lui a permis d’expliquer rapidement d’où vient la crise de surproduction qui secoue actuellement le système capitaliste. Il s’est ensuite attaché à souligner les qualités et les limites du programme du Front de Gauche, L’Humain d’abord, en appelant les camarades à défendre un programme communiste, c’est-à-dire qui s’attaque à la racine de tous les problèmes : la propriété capitaliste des grands moyens de production. Il a enfin expliqué la différence entre le mot d’ordre illusoire d’une « Europe sociale » sur la base du capitalisme – et la perspective révolutionnaire d’une « Fédération des Etats socialistes d’Europe », que nous défendons et qui remonte aux premières années de la IIIe Internationale.
La plupart des camarades présents ayant assisté aux deux réunions précédentes, la discussion s’en est trouvée enrichie par toutes les idées échangées la veille et l’avant-veille – sur les questions du programme, du rôle des directions du mouvement ouvrier, etc. Chacun comprenait bien que, décidément, les grandes leçons du passé éclairent les luttes actuelles et à venir.