L’article suivant a été rédigé et nous a été envoyé par un jeune Français parti au Venezuela comme touriste, et qui, une fois sur place, s’est intéressé de très près à la révolution vénézuélienne, qu’il soutient.
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C’est lors d’un voyage au Venezuela que j’ai compris le sens réel de la lutte des classes. Au départ, je n’étais venu dans ce pays que dans un cadre touristique. Mais sur place, j’ai pris conscience de l’ampleur de la Révolution bolivarienne. Je me suis très vite rendu compte du décalage entre la réalité et ce que l’on peut lire dans les médias capitalistes occidentaux, sur le Venezuela.
Des avancées sociales et culturelles
C’est en discutant simplement avec les Vénézuéliens que l’on comprend les progrès et les acquis de cette révolution. Il ne faut pas oublier qu’avant l’arrivée de Hugo Chavez au pouvoir, une grande majorité de la population était laissée-pour-compte.
Aujourd’hui, selon l’UNESCO, l’analphabétisme ne toucherait plus que 2 % de la population, grâce au programme mis en place par le gouvernement sous la forme de la mission Robinson, qui a permis à plus d’1,6 million de personnes d’apprendre à lire et à écrire. Par ailleurs, les missions Ribas et Sucrepermettent à ceux qui le souhaitent de poursuivre des études secondaires, puis universitaires. A ce jour, plus d’un million de personnes en ont bénéficié.
En 2003, la mission barrios adentros a été lancée. Après un accord passé avec Cuba (qui met à disposition des milliers de médecins), des centres de consultation gratuits spécialisés aussi bien dans la médecine générale, l’ophtalmologie ou l’orthodontie ont été ouverts dans tout le pays, et notamment dans les quartiers les plus défavorisés.
En douze ans de révolution, la culture s’est aussi considérablement développée. Avant, seule une petite élite bourgeoise y avait accès. Aujourd’hui, les centres culturels et musées se sont largement ouverts au public : expositions, concerts, spectacles ou rétrospectives. La culture est désormais un droit pour tous, au Venezuela. Et depuis 2008, avec la mission Corazón Adentro, des ateliers de danse, de théâtre, de musique ou encore d’art plastique sont organisés dans les quartiers défavorisés.
La Estancia PDVSA de Caracas est devenue un symbole de cette ouverture. Cette ancienne hacienda de café, qui appartient à l’entreprise pétrolière PDVSA, a été convertie en centre d’art, alors qu’elle était à l’origine destinée au bon plaisir d’une minorité privilégiée de PDVSA, qui y organisait des événements privés. C’est suite à la défaite du sabotage pétrolier de décembre 2002 et aux changements qu’elle a occasionnés, au sein de l’entreprise, que la nouvelle administration en a ouvert les portes au grand public.
Sur la liberté de la presse
On entend souvent la droite et les médias occidentaux critiquer le gouvernement vénézuélien pour de prétendues atteintes à la liberté de la presse. Or, 80 % des journaux du pays se déclarent d’opposition ou « neutres » ! Par ailleurs, la presse d’opposition est loin d’avoir peur de la censure, ici, et les attaques contre le président sont fréquentes, violentes et souvent inexactes – voire complètement fausses.
En 2007, un événement avait particulièrement retenu l’attention : l’annonce du refus de renouveler la licence de la chaîne de télévision RCTV, connue pour être très critique envers le gouvernement. Il avait été dit que Chavez s’opposait à la démocratie et qu’il souhaitait bâillonner les médias. Or les faits étaient tout autres. En une année, RCTV avait commis pas moins de 652 infractions. De plus, la chaîne était connue pour inciter au désordre public, comme lors des manifestations de décembre 2002, sans oublier qu’elle avait soutenu le coup d’Etat d’avril 2002.
En finir avec le capitalisme !
Aujourd’hui, l’une des principales préoccupations est l’inflation. En 2010, elle a augmenté de 27,2 %. Sur le seul premier trimestre 2011, elle a bondi de 6 %. Si les critiques visent essentiellement le gouvernement, comment ne pas porter son attention sur les entreprises capitalistes vénézueliennes, qui au lieu de développer la production et l’industrie, la ralentissent, favorisant ainsi les importations. Ce n’est ni plus ni moins qu’un sabotage visant à en finir avec la révolution bolivarienne. Tant que ces pans de l’économie ne seront pas nationalisés, sous le contrôle des travailleurs, jamais le Venezuela ne pourra mener la révolution à son terme.
Chavez a récemment annoncé qu’il comptait faire une proposition afin d’élever de nouveau le salaire minimum (1223,89 bolivars actuellement, soit 197,64 euros), ainsi que les retraites. Néanmoins, le président a rappelé qu’en 2010, aucun prix n’avait subi d’augmentation dans les magasins ou supermarchés appartenant à l’Etat (Bicentenario, Comerso Socialista). A l’inverse, les magasins Mercal Alimentos (de la mission Mercal, œuvrant à la distribution et à la vente de produits alimentaires aux plus démunis) continuent de vendre en dessous de 30 à 45 % du prix normal sur le marché actuel, la différence étant payée par le gouvernement. Sans oublier PDVAL, la filiale de PDVSA (Petróleos de Venezuela), qui revend également à un prix régulé des aliments et du matériel de maison, soit produits et directement commercialisés au Venezuela, soit, selon certains accords conclus avec d’autres pays d’Amérique latine, échangés contre du pétrole.
Néanmoins, l’opposition s’est emparée du sujet et en a fait un argument de campagne. Comme lors des dernières élections législatives de septembre 2010, où certains ont parlé d’un revers. Or, même s’il est vrai que l’opposition a gagné dangereusement du terrain, le PSUV (Partido Socialista Unido de Venezuela) conserve une majorité de députés à l’Assemblée.
Il est clair, cependant, que le résultat de ces élections était un sérieux avertissement. La corruption continue de régner au sein de la bureaucratie, héritage des anciens gouvernements. Récemment encore, des containers de nourriture destinés à être distribués ont été découverts : ils allaient être revendus sur le marché parallèle. Certaines personnes, et c’est tout à fait logique, ne font pas de différence entre la révolution et une partie de cette administration corrompue qui la dirige, car elles vont de pair ! Ainsi, un nombre croissant de Vénézuéliens perd confiance dans cette révolution.
Hugo Chavez a souvent dénoncé la bureaucratie qui gangrène l’administration bolivarienne à tous les niveaux – et ralentit le processus révolutionnaire. Prenant l’exemple de la bureaucratie en URSS, Chavez a rappelé que c’est cette bureaucratie qui avait stoppé le formidable élan de la révolution bolchevique.
Une révolution à mener à terme
Le peuple vénézuélien est conscient de son destin, et conscient qu’il doit se prendre en main. Des ouvriers venant de toutes les régions du pays ont dernièrement manifesté à Caracas, réclamant entre autre d’en terminer avec la bureaucratie et le capitalisme. Ils demandent un contrôle ouvrier total dans les usines, comme c’est le cas déjà dans cinq d’entre elles. Par exemple, l’usine Inveval, située à Los Teques, dans l’état de Miranda, avait été expropriée par le gouvernement en 2005 (au terme d’une lutte de plusieurs années), et est gérée aujourd’hui uniquement par les travailleurs de l’entreprise. Elle fabrique des valves pour l’industrie pétrolière.
Le Venezuela est encore loin d’en avoir fini avec le capitalisme. Le chemin est encore long, et si la révolution bolivarienne ne veut pas s’essouffler, après 12 ans de bataille, une vitesse supérieure doit être enclenchée. Car le capitalisme, comme un cancer, s’est infiltré à tous les niveaux et s’accroche. Et comme l’expliquaient K. Marx et F. Engels dans le Manifeste du Parti Communiste : « Les communistes ne s’abaissent pas à dissimuler leurs opinions et leurs projets. Ils proclament ouvertement que leurs buts ne peuvent être atteints que par le renversement violent de tout l’ordre social passé. Que les classes dirigeantes tremblent à l’idée d’une révolution communiste ! Les prolétaires n’y ont rien à perdre que leurs chaînes. Ils ont un monde à y gagner. »
¡ Y que siga la Revolución !
Cédric B.