Lors de la consultation interne du PCF sur les élections régionales, en novembre dernier, les militants communistes ont très largement soutenu le choix de constituer des listes du Front de Gauche, au premier tour.
Beaucoup de camarades voient dans le Front de Gauche une alternative à la stratégie « d’alliances systématiques » du PCF avec le PS – laquelle stratégie s’est accompagnée, ces dernières décennies, d’une subordination du parti à la politique et au programme pro-capitalistes des dirigeants socialistes. Nous partageons entièrement cette préoccupation. Cependant, le fait de se distinguer du PS par des listes indépendantes, aux élections, ne suffit pas à constituer un programme distinct de celui du PS. Il faut au PCF un programme offensif, qui s’attaque à la racine des injustices, de l’oppression et de la misère, qui propose une alternative révolutionnaire au capitalisme – en un mot, un programme communiste.
Cette question se posera très concrètement, entre les deux tours et au lendemain du deuxième tour des régionales. Entre les deux tours, il faudra décider de fusionner – ou non – avec les listes du PS. Au lendemain du deuxième tour, il faudra décider d’intégrer – ou non – des exécutifs régionaux, aux côtés des élus socialistes. Qu’est-ce qui doit déterminer l’attitude du parti, dans ces choix ? Le programme.
Le PCF doit poser des conditions programmatiques concrètes à sa participation aux exécutifs régionaux. Il doit notamment rejeter toute politique de privatisation ou de subvention des capitalistes. Le PCF doit également exclure de fusionner avec des listes du PS dirigées par des réactionnaires aussi discrédités que Georges Frêche, par exemple. Sur des listes de deuxième tour avec le PS, le PCF doit pouvoir mener une campagne indépendante, avec son propre matériel politique, ses idées et son programme, qui doivent se distinguer clairement du réformisme extrêmement modéré des dirigeants socialistes. Sans cela, les efforts pour « s’émanciper » du PS, au premier tour, seraient liquidés au deuxième. Ils se réduiraient à une simple posture électorale.
Le cas de l’Ile de France
Le bilan des élus communistes dans les Conseils Régionaux souligne l’urgence de sérieux changements, dans le programme du parti. Prenons le cas de l’Ile de France. Les élus communistes de cette région ont fait circuler un document détaillant leur action entre 2004 et 2010. Intitulé Des actes, Un bilan, ce document liste une longue série de mesures. Plusieurs d’entre elles vont dans la bonne direction, comme par exemple la gratuité des transports publics pour les Rmistes et la réduction de 75% du prix de ces transports pour les titulaires de la CMU, de l’AME, de l’ASS et de l’API. On s’attend à de telles mesures, de la part d’élus communistes. Mais ce à quoi on s’attend beaucoup moins, c’est à la politique qui consiste à verser des millions d’euros dans les caisses d’entreprises privées, sous couvert de « développement économique » et de « lutte contre le chômage ».
Dans la rubrique « Appui aux entreprises » de ce document, on trouve par exemple une liste de mesures parmi lesquelles : « Cap Entreprise : dispositif d’accompagnement des créateurs et dirigeants d’entreprises : plus de 8000 bénéficiaires depuis 2004. » Puis : « Fonds de prêts d’honneur : 4364 prêts accordés depuis 2004. » Puis encore : « AREX (aide à l’export) : 2262 entreprises bénéficiaires entre 2004 et 2007 ». Dans la rubrique « Accompagnement et anticipation des mutations économiques », on lit :« Aide à la commercialisation et l’export : 2638 dossiers soutenus entre 2004 et 2008 ». Franchement, lorsqu’on voit les efforts des élus communistes pour stimuler les exportations des entreprises d’Ile de France, on ne peut pas les accuser d’être responsables du déficit abyssal du commerce extérieur français ! Ni d’ailleurs de la crise de l’immobilier, puisque dans la rubrique « Développement local des territoires », nous lisons : « Immobilier d’entreprise, pépinières et hôtels d’entreprise : 49 opérations soutenues depuis 2004 (15,68 M€). » Et ainsi de suite.
Malheureusement, cette politique n’est pas le seul fait du Conseil Régional d’Ile de France. Tous les Conseils Régionaux font de même. Des dirigeants du parti cherchent à justifier cette politique en évoquant de vagues « contrôles » sur les conditions de travail et la politique d’emploi dans les entreprises subventionnées. Or, de l’aveu même des élus du parti, le nombre de ces « contrôles » n’a pas été significatif. Mais de toutes façons, en quoi peuvent-ils bien consister ? Un coup de fil ? Un courrier ? Une visite des bureaux de l’employeur ? Y a-t-il eu ne serait-ce qu’un seul cas d’entreprise à laquelle on aurait exigé de restituer la subvention accordée ? Nous n’en avons jamais entendu parler. Mais si c’est arrivé, c’est forcément très marginal. Or, les licenciements et les conditions de travail scandaleuses ne sont pas un phénomène marginal !
Il est urgent d’ouvrir un débat sérieux, dans le parti, sur la politique menée par nos élus au sein des collectivités locales. Les élus communistes doivent rompre avec cette politique de subventions massives aux entreprises privées. Ils doivent militer pour que les budgets des collectivités locales servent en priorité le renforcement des services publics et la lutte contre la pauvreté.
La Riposte