Lundi matin, il a été confirmé que Mel Zelaya, le président légitime du Honduras, est actuellement dans la capitale du pays, Tegucigalpa, et plus exactement dans l’ambassade brésilienne. Le président Zelaya y a lancé un appel au peuple du Honduras pour qu’il sorte le protéger. Des dizaines de milliers de personnes ont répondu à cet appel.
Zelaya a été renversé par un coup d’Etat organisé par l’oligarchie, le 28 juin dernier. Depuis, les travailleurs, les paysans et la jeunesse du pays ont mené une lutte héroïque contre les putschistes, qui ont répondu par une répression brutale, des assassinats ciblés, des arrestations massives et un blocus médiatique. C’est uniquement la résistance des masses, dirigée par le Front National de Résistance contre le Coup, qui a permis le retour de Zelaya au Honduras – et non les manœuvres diplomatiques ou la pression internationale (très faible) sur le régime.
Le retour de Zelaya a pris le régime complètement par surprise. Dans un premier temps, les putschistes ont démenti l’information selon laquelle Zelaya était au Honduras. Mais des images du président dans l’ambassade brésilienne avaient déjà été publiées dans des médias internationaux. Des milliers de Honduriens se rassemblaient déjà devant l’ambassade du Brésil. Pendant plus de cinq heures, le gouvernement de Micheletti n’a fait aucune communication officielle. Puis, à 17 heures, Michelleti a tenu une conférence de presse, entouré de représentants de la classe capitaliste, et a demandé que le Brésil livre Zelaya au gouvernement, afin qu’il soit jugé. Le couvre-feu a été rétabli.
Il est clair que le régime va tenter de réprimer le mouvement. Dans une déclaration, l’Etat-major de l’armée a déclaré qu’il défendrait « l’ordre constitutionnel » (c’est-à-dire le gouvernement putschiste), « même s’il faut sacrifier des vies humaines ». Le réseau de téléphones portables a été coupé, les radios d’opposition ont été privées d’électricité et d’ondes. L’armée a occupé et fermé les quatre aéroports du pays.
Mais après 86 jours de résistance populaire, l’enthousiasme suscité par le retour de Zelaya ne pourra pas être arrêté par la répression. Il est bien possible que nous assistions aux derniers jours du régime putschiste. En fin de soirée, lundi, 50 000 personnes défiaient le couvre-feu et se rassemblaient devant l’ambassade du Brésil. Au même moment, Zelaya se réunissait avec les dirigeants de la résistance. Les rues débordaient de joie et de chants. Dans le quartier ouvrier de Kennedy, 3000 personnes ont manifesté jusqu’à minuit. Des scènes semblables se sont répétées dans tout le pays.
Cependant, la lutte n’est pas terminée. Les putschistes sont toujours au pouvoir et contrôlent l’appareil d’Etat (y compris l’armée et la police). Face à une insurrection populaire, ils pourraient recourir à des mesures désespérées pour s’accrocher au pouvoir.
Dans le même temps, des sections de l’oligarchie – et, surtout, l’impérialisme américain – s’efforceront de trouver un accord négocié, de façon à sauver ce qui peut l’être. Washington a déjà demandé de se baser sur l’ « accord » de San José, qui, comme nous l’avons expliqué dans d’autres articles (voir ICI), reviendrait à lier les pieds et les mains de Zelaya – et à satisfaire les objectifs de l’oligarchie. Cela doit être rejeté ! Il ne doit pas y avoir d’amnistie pour les putschistes [les accords de San José parlent d’une telle amnistie]. La volonté du peuple doit s’exprimer dans l’élection libre et démocratique d’une Assemblée Constituante Révolutionnaire – et non dans les élections frauduleuses que les putschistes veulent organiser le 29 novembre prochain.
Lors d’une réunion exceptionnelle de l’Organisation des Etats Américains, une résolution a été adoptée pour soutenir l’accord de San José. Cependant, le Nicaragua et le Venezuela ont voté contre cette résolution. L’ambassadeur du Nicaragua a déclaré avoir parlé à Zelaya, qui lui a dit qu’il rejetait, lui aussi, l’accord de San José – qu’il avait précédemment accepté. C’est correct et on doit s’en féliciter. D’autres gouvernements latino-américains doivent être mis sous pression pour suivre cette ligne (à commencer par la Bolivie, le Salvador et l’Equateur).
Dans les prochaines heures, en même temps qu’une tentative de noyer le mouvement dans la répression, on peut s’attendre à des négociations frénétiques pour sauver la légalité capitaliste, ainsi que les têtes des putschistes les plus en vue et de leurs supporters, dans la classe capitaliste.
Les masses doivent infliger le coup fatal au régime. Le Front National de Résistance a appelé à une marche nationale sur la capitale, qui pourrait être encore plus grande que celle – historique – de juillet dernier, lorsque Zelaya a tenté d’entrer en avion dans le pays. Cette manifestation doit s’accompagner d’une grève générale, avec occupations. Les travailleurs doivent se rendre maîtres de la situation. Si le régime coupe l’électricité aux stations de radio, les travailleurs doivent les reconnecter. Si le régime coupe le réseau de téléphones portables, les travailleurs des télécommunications doivent le restaurer. Les syndicats d’enseignants ont déjà appelé à une grève illimitée à compter de mardi matin. Les comités locaux et régionaux du Front doivent prendre le contrôle de la situation et coordonner leurs actions à travers des représentants démocratiquement élus, de façon à constituer un pouvoir alternatif à celui des putschistes.
Il faut aussi clairement appeler la base de l’armée et de la police à désobéir aux ordres de leur hiérarchie. Zelaya les a déjà appelés à retourner leurs fusils contre leurs officiers. Cela doit être appuyé par une mobilisation de masse dans la rue et devant les casernes. Dans le même temps, le mouvement doit se défendre contre les provocations et la répression. Des barricades ont été érigées devant l’ambassade du Brésil. Des milices d’auto-défense doivent être organisées.
Les prochaines heures seront décisives. Le rapport de force est à l’avantage des masses. Elles peuvent porter le coup de grâce au gouvernement de Michelleti et jeter les bases d’un nouveau régime fondé sur l’organisation des masses. Une Assemblée Constituante Révolutionnaire, convoquée sous l’autorité du Front National de Résistance, est la voie vers la satisfaction des aspirations populaires.
A bas le coup d’Etat !
Grève générale, marche sur Tegucigalpa et soulèvement populaire !
Pour une Assemblée Constituante Révolutionnaire !
Jorge Martín, le 22 septembre