Au fil des années, de « réforme » en « réforme », les conditions de retraite des salariés se dégradent. Parmi les 6 millions de personnes, en France, qui vivent sous le seuil de pauvreté, il y a de nombreuses personnes âgées, qui finissent leurs jours dans la pénurie et l’isolement.
Sarkozy s’attaque aujourd’hui aux « régimes spéciaux ». Lui qui revient – et pas pour la première fois – de vacances que seuls des multi-millionnaires pourraient se payer, se permet de fustiger les 1,6 millions de salariés concernés comme autant de « privilégiés ». Son but est de les stigmatiser et les discréditer aux yeux des autres travailleurs. En tentant de démolir les régimes spéciaux, il ne ferait qu’œuvrer à l’égalité de tous – rien de moins !
Ce serait une fierté, pour Sarkozy, de réussir là où Juppé a échoué, en 1995. A l’époque, Juppé s’est trouvé confronté à l’un des plus grands mouvements de grève de l’histoire de France. Après plusieurs semaines de conflit, pendant lesquelles les sondages indiquaient que 65% de la population était solidaires des grévistes, Juppé a finalement capitulé.
Par « égalité », l’hypocrite Sarkozy – tout comme Fillon (le Premier Ministre, peu connu du grand public) – entend « nivellement par le bas ». Par des coupes successives, la droite et le patronat veulent réduire le niveau des prestations des retraités. Premièrement, parce que les gens qui ne travaillent plus ne sont pas rentables : il y a « trop » de retraités, comme il y a d’ailleurs trop d’étudiants, trop de malades à soigner, etc. Deuxièmement, Sarkozy veut obliger les gens à se tourner vers les assurances privées. Les compagnies d’assurance n’acceptent pas que ce vaste marché potentiel, qui leur apporterait des dizaines de milliards d’euros de bénéfices, ne leur soit pas complètement ouvert en raison du système de retraites par répartition.
Devant la gravité de cette nouvelle attaque, l’attitude des directions syndicales est loin d’être à la hauteur. Tous, y compris Thibault, acceptent tacitement la nécessité d’une réforme. Or, dans la mesure où personne ne s’imagine qu’une réforme proposée par la droite puisse améliorer les retraites, les dirigeants syndicaux acceptent, de fait, le principe de leur dévalorisation. Ce n’est pas comme cela qu’on va mobiliser la population contre le gouvernement. Les dirigeants syndicaux mettent l’accent sur le « passage en force » du gouvernement, sur la nécessité de les consulter, de les impliquer dans l’élaboration des mesures à prendre, etc. Ce qui semble leur importer le plus, c’est leur propre rôle, leur propre prestige. Comme si tout ce qu’ils demandaient, c’est de pouvoir dire aux salariés : « oui, vous aurez moins de retraite qu’avant, et vous allez devoir travailler plus longtemps pour y avoir droit. Mais sans nous et nos consultations, vous auriez perdu beaucoup plus ! » Le syndicalisme de « proposition et d’accompagnement » prend le pas sur celui de lutte et de contestation.
En s’attaquant aux régimes spéciaux, Sarkozy s’attaque en fait à toutes les retraites. Car s’il réussit à imposer cette réforme, d’autres suivront. Ce dont les salariés ont besoin, c’est de directions syndicales qui restent fermes et implacables dans la défense de leurs intérêts, et qui démontent systématiquement les arguments tendant à justifier les « réformes » – qui sont, en fait, des contre-réformes – et à jeter de la poudre aux yeux des travailleurs. Il faut présenter hardiment, avec conviction, un programme revendicatif pour développer une mobilisation aussi puissante que possible. Plus les dirigeants syndicaux sembleront hésitants, enclins à des compromis, voire à la capitulation – comme c’est déjà le cas de la direction de la CFDT – moins les salariés se jetteront dans une bataille qui risque d’être particulièrement ardue.
Une véritable égalité des conditions de retraite est impossible à atteindre. Les situations sont trop différentes. Mais nous ne devons accepter aucune détérioration des conditions de retraite, pour quelque catégorie de salariés que ce soit. Et au-delà des différences qui peuvent exister entre ces différentes catégories, il faut insister sur le fait que la retraite ne devrait jamais être inférieure au SMIC, et l’âge du départ jamais supérieur à 60 ans, quel que soit le nombre d’années de travail effectuées.
La Riposte