Nous vivons une époque d’énorme et croissante polarisation entre riches et pauvres. Il y a eu une augmentation sans précédent des inégalités. Le fossé entre riches et pauvres s’est transformé en abyme. De même, l’écart entre les pays riches et les pays pauvres a énormément augmenté. Prés de la moitié de la population mondiale vit avec 2 dollars par jour, alors que quelques mains concentrent une quantité obscène de richesse et de luxe. A une époque où l’on discute de la possibilité d’aller sur Mars, 7 millions d’enfants meurent chaque année de maladies liées au manque d’eau potable.
La planète entière a été mise à sac par la rapacité des multinationales. Dans les soi-disant pays en voie de développement, les conditions de vie des masses ne s’améliorent pas, mais se détériorent. Ce déclin n’est même pas interrompu par les périodes de croissance. D’après un récent rapport des Nations Unies, au cours des années 1990, le PIB par habitant a chuté dans 54 pays « en voie de développement ». Dans les années 80, l’Indice de Développement Humain – qui tient compte des indices relatifs à la santé, l’espérance de vie, l’éducation et le niveau de vie – a baissé dans 4 pays pauvres. Dans les années 90, en pleine période de croissance, il a baissé dans 21 pays.
L’Afrique sub-saharienne est un enfer où le barbarisme s’empare d’un pays après l’autre. Ici, l’affirmation de Lénine : « le capitalisme, c’est l’horreur sans fin », acquiert toute sa force. La Sierra Léone, le Congo, le Rwanda, le Libéria – tous ces pays ont connu des massacres, la mutilation et le cannibalisme. Ces horribles convulsions sont une indication de la totale incapacité du capitalisme à résoudre les problèmes de ces peuples, malgré la richesse minérale colossale qu’ils possèdent – ou plutôt à cause de ces richesses. Des groupes rivaux de gangsters soutiennent l’un ou l’autre des Etats pour s’emparer de leurs diamants ou de leurs autres richesses minérales, et l’on voit toujours la main des puissances impérialistes ou des multinationales tirer les ficelles. Durant la seule guerre civile au Congo, pas moins de 4,5 millions de personnes ont été massacrées – pour la plupart d’innocents villageois. Plus d’un quart de million de personnes ont été tuées lors des guerres civiles au Libéria, en Sierra Léone, en Guinée et en Côte d’Ivoire.
En Afrique, l’épidémie du sida engendre la mort et la misère à une échelle comparable à ce qu’a connu l’Europe, au Moyen Age, avec la « Peste Noire ». Des médicaments existent qui pourraient considérablement soulager les populations touchées, mais du fait de l’avidité des grandes compagnies pharmaceutiques, ces médicaments ne sont pas à la portée des malades des pays pauvres, qui ne peuvent se les payer. Les capitalistes contemplent cet épouvantable océan de misère humaine avec une indifférence suprême. Dans tous les cas, même si les médicaments étaient accessibles à des prix abordables, la plupart de ces gens mourraient de faim. Même dans les pays qui ont connu quelques améliorations, la croissance économique ne signifie pas l’amélioration des conditions de vie des masses. Le PIB de l’Ouganda a crû de 6 % par an au cours les dix dernières années, mais le PIB par habitant est inférieur à 250 dollars par an. Ceci dit, le potentiel révolutionnaire de la classe ouvrière s’est manifesté par la magnifique grève générale au Nigéria. La classe ouvrière aurait facilement pu prendre le pouvoir, mais les dirigeants syndicaux ont une nouvelle fois fait obstacle au mouvement. Ils ont sauvé la classe dirigeante, qui les a remerciés en les arrêtant.
La soi-disant aide fournie par les impérialistes est une blague de mauvais goût. Elle est insignifiante et, en général, elle est liée à des accords commerciaux, souvent dans le secteur des armes. En outre, ces « aides » ridicules sont réduites à néant par le pillage massif que réalisent les impérialistes à travers les termes d’échanges inéquitables et les intérêts des dettes. L’« aide » des Etats-Unis représente à peine 0,1 % de son PIB, soit la moitié de l’aide moyenne apportée par les autres pays (le petit Danemark donne 0,9 % de son PIB). Et la minuscule aide payée par les Etats-Unis n’est même pas véritablement une aide. Une grande quantité de celle-ci consiste en nourriture – et représente en réalité une forme de subvention déguisée aux agriculteurs américains.
Contrairement à ce qu’affirment les organisations petites-bourgeoises occidentales, la polarisation entre riches et pauvres n’est pas un phénomène géographique. En même temps qu’elles affament des millions de gens en Asie, en Afrique et en Amérique Latine, les grandes multinationales intensifient l’exploitation des travailleurs de leurs propre pays. En 1970, les indemnités annuelles des 100 plus grands PDG (chief executives) s’élevaient à plus de 1,3 millions de dollars (rapportés à la valeur de la monnaie actuelle), soit 39 fois le salaire moyen d’un travailleur. En 2000, ce chiffre est monté jusqu’à 37,5 millions de dollars, soit 1000 fois le salaire annuel moyen d’un travailleur. Jamais, dans l’histoire, le fossé entre salariés et patrons n’a été aussi grand. Jamais il n’y a eu autant de pouvoir et de richesse concentrés en si peu de mains.