Alors que l’attention du monde est concentrée sur la guerre en Irak, une autre guerre éclate en Israël – la guerre des classes. Le ministre israélien des finances, Benjamin Nétanyahou, a fait l’annonce, il y a quelques jours, de plans pour diminuer les dépenses du gouvernement de 11,4 milliards de shekels (environ 15 milliards de francs). Le déficit budgétaire a en effet atteint le niveau sans précédent de 6% du produit intérieur brut.
Ces deux dernières années, Israël a été frappé par une grave crise économique. Le chômage, quasiment inexistant par le passé, touche aujourd’hui près de 15% de la population active. La bulle spéculative des « nouvelles technologies » a éclaté il y a deux ans, et les marchés financiers ont plongé.
Dans le même temps, Sharon a concentré tous ses efforts sur la répression de la résistance palestinienne. A présent, il projette d’aller jusqu’à construire un mur enserrant la totalité de la Cisjordanie. Au début, ce mur a été présenté comme une barrière « pour se protéger des terroristes », mais Sharon projette maintenant de le prolonger tout autour à la vallée du Jourdain. Cela revient à construire une prison massive pour les Palestiniens, qui subissent déjà le joug écrasant de l’armée israélienne. Il a aussi augmenté le budget de la défense et de la « sécurité ».
Sharon soutient les colons et fait de larges concessions aux partis sionistes orthodoxes d’extrême-droite, de façon à les maintenir dans sa coalition. Ainsi, on a une récession de l’économie, qui a entraîné la chute des recettes fiscales, et, en même temps, des dépenses accrues pour la défense, ce qui aggravera un déficit budgétaire toujours plus incontrôlé.
Au lieu de diminuer les dépenses militaires, Sharon s’attaque aux dépenses sociales. Israël reçoit chaque année plus que 4 milliards de dollars d’aide des Etats-Unis. Récemment, les Etats-Unis ont promis 10 milliards de dollars supplémentaires – sous certaines conditions. Comme l’a expliqué Nétanyahou, cet argent sera fourni à Israël si le gouvernement adopte « un plan économique cohérent ». Autrement dit, les Etats-Unis donneront l’argent à condition que Sharon diminue les dépenses sociales et poursuive le programme de privatisations.
Tout cela indique une chose très claire : les alliés des capitalistes américains en Israël ne sont pas les ouvriers israéliens ordinaires. C’est seulement la classe dirigeante israélienne qui est alliée aux USA. Ils ont les mêmes intérêts. Ainsi, tandis que les Américains font la guerre à l’Irak, ils poussent Sharon – comme s’il avait besoin d’y être encouragé – à lancer une guerre contre les travailleurs israéliens.
Cependant, comme c’est bien connu, toute action provoque une réaction égale et opposée. La principale fédération syndicale israélienne, l’Histadrout, a exprimé sa colère contre les plans du gouvernement, qui prévoient la suppression de plusieurs milliers d’emplois dans le secteur public. Le gouvernement projette également de diminuer les salaires des employés restants.
L’Histadrout a officiellement déclaré un “conflit social”, ce qui veut dire que ses membres doivent maintenant voter pour ou contre un action de grève. Et c’est une grève générale qui se prépare. Elle pourrait frapper les services gouvernementaux, la plupart des services de transport, et également des services municipaux. Beaucoup d’entreprises privées seraient aussi affectées par la grève, ce qui pourrait complètement paralyser l’économie.
Le Président de l’Histadrout, Amir Peretz, a déclaré : « L’Histadrout ne sera pas la victime du plan économique, et elle luttera sans compromis contre ce plan. Nous n’avons pas l’intention de perdre cette bataille.
Comme nous l’avons précisé de nombreuses fois, la crise du capitalisme affectera inévitablement les ouvriers israéliens, au même titre que ceux du reste du monde. Les capitalistes israéliens sont jusqu’à présent parvenus à imposer leur politique aux travailleurs israéliens. Mais qu’est-ce que le capitalisme peut leur offrir ? A présent, c’est clair : des coupes dans les dépenses sociales, c’est-à-dire dans les retraites, l’éducation, la santé, etc., et la privatisation des services publics, dont la Grande-Bretagne nous a montré quelles pouvaient en être les conséquences.
Tout cela pose les conditions d’un réveil de la lutte de classe en Israël. Et ce n’est que le début. Dès lors que les travailleurs israéliens recommenceront à lutter massivement, beaucoup de choses se clarifieront. Ils apprendront que leur véritable ennemi n’est pas le peuple palestinien, mais leur propre gouvernement. Nous faisons confiance aux travailleurs israéliens pour prendre toute leur place dans la lutte des classes qui se ranime, aujourd’hui, sur les cinq continents de la planète.
Fred Weston